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Intensification des transferts de chaleur

Cet axe présente une grande diversité de sujets et de collaborations locales (CEA, LRP, G2elab, Simap) et nationales (Cethils, IMFT, IUST, Pprime). Un partenariat privilégié existe avec le CEA Grenoble qui héberge deux de nos membres au sein du Liten. Les partenaires industriels concernés par la problématique des transferts de chaleur sont Alcatel, PSA, Thalles, Safran. Tous les enseignants chercheurs de la 62ème section du CNU participent à ces recherches. Pour la période considérée, huit thèses ont été soutenues et trois autres sont en cours.

De nombreux procédés nécessitent un contrôle efficace de la température ainsi qu’un échange de chaleur important à l’interface d’une paroi et d’un fluide. L’intensification des transferts de chaleur par convection forcée en mode monophasique ou diphasique est un axe de recherche pérenne de l’équipe Énergétique. Le partenariat historique avec le CEA Grenoble (qui accueille au sein du Liten deux membres de l’équipe) s’est enrichi d’une nouvelle collaboration avec le Service des Basses Températures de l’INAC. Une collaboration récurrente nous lie également avec le G2Elab sur le thème du refroidissement de l’électronique de puissance.

L’intensification des transferts est abordée par deux méthodes.

Une méthode que l’on peut qualifier de passive consiste à structurer la surface de la paroi d’un régénérateur ou d’un échangeur. Cette structuration peut se faire sous différentes formes et à plusieurs échelles. La présence sur le site grenoblois de centrales de micro- nanofabrication (PTA au CEA, Nanofab au CNRS) est un atout précieux qui participe au dynamisme et à l’originalité de ces recherches.

Nous avons développé une microstructuration de surfaces pour l’optimisation de la miniaturisation de cryorégénérateurs de type tubes à gaz pulsé, utilisés dans l’industrie spatiale (CEA INAC SBT). Ces circuits fonctionnent avec un écoulement monophasique gazeux. Les moyens de microfabrication nous ont permis d’intégrer dans des microcanaux différents réseaux à la géométrie parfaitement contrôlée, et d’étudier l’influence des facteurs d’aspect et de la porosité tant sur la perte de charge du gaz en écoulement que sur les échanges thermiques (A. Sochinskii, Labex LANEF CEA SBT). Diminuer la porosité du réseau améliore les échanges thermiques mais augmente les pertes de charge et la difficulté est d’atteindre un compromis énergétiquement favorable. L’étude par simulation de l’écoulement et du transfert de chaleur en conditions stationnaires a permis de démontrer que de telles géométries étaient effectivement plus performantes que celles des régénérateurs conventionnels composés d’un amas de sphères ou de fibres métalliques. L’étude expérimentale de l’écoulement a confirmé et a quantifié l’influence de la porosité sur les pertes de charges associées.

Structuration d'un micro-régénérateur par des motifs en losange, au cœur d'un microcanal. La barre d'échelle vaut 30 µm.
Structuration d’un micro-régénérateur par des motifs en losange, au cœur d’un microcanal. La barre d’échelle vaut 30 µm.

Dans certaines situations, un écoulement monophasique est insuffisant pour assurer l’évacuation du flux de chaleur. Plusieurs méthodes de refroidissement diphasique existent : l’ébullition nucléée (une surface chaude est immergée dans un fluide), l’ébullition convective (un fluide s’écoule dans un canal chaud) et le refroidissement par spray (un fluide en gouttelettes impacte une surface chaude) cette dernière technique étant susceptible d’évacuer jusqu’à 1000 W/cm2 car elle conjugue convection liquide et évaporation des gouttes.

Dispositif de production d'un spray liquide.
Dispositif de production d’un spray liquide.

Une simple structuration de surface peut jouer un rôle sur l’ébullition : une surface hydrophobe favorisera la nucléation, tandis qu’une surface hydrophile facilitera le détachement des bulles de vapeur. Nous avons étudié des revêtements polymères thermosensibles qui présentent un changement brutal de leur énergie de surface en fonction de la température : hydrophiles en dessous d’une température critique, ils deviennent hydrophobes au-dessus. L’idée est de piloter l’ébullition à cette température critique, afin que la formation de vapeur se fasse en condition hydrophobe et que l’enthalpie puisée à la paroi lors de l’ébullition la refroidisse en dessous afin de faciliter le détachement des bulles [Bertossi et al. 2015].

Exemples de surfaces structurées à l'échelle macroscopique.
Exemples de surfaces structurées à l’échelle macroscopique.
Évolution du coefficient d'échange surfacique en fonction du flux de chaleur pour différentes structures.
Évolution du coefficient d’échange surfacique en fonction du flux de chaleur pour différentes structures.

Une structuration de surface plus affinée augmente le nombre de sites de nucléation et la fréquence théorique d’émission de bulles, ce qui doit améliorer les échanges thermiques. Concernant l’optimisation d’une paroi d’échangeurs, nous avons trouvé que la structuration de surface ne se fera pas à la même échelle selon le type de méthode de refroidissement (ébullition nucléée, convective, spray). Nous avons montré qu’une combinaison des échelles de structuration macroscopiques et microscopiques est parfois nécessaire (M.C. Riofrio, FUI Thermofluide & Institut Carnot). En effet, le refroidissement par pulvérisation est influencé par plusieurs phénomènes physiques couplés dont le rôle est renforcé soit par une structuration macroscopique (retard du flux critique, hydrophobicité) soit par une structuration micro- ou nanométrique (mouillabilité, capillarité, sites de nucléation) [Riofrio et al. 2016]. Ces acquis sont actuellement exploités pour étudier des fluides diélectriques susceptibles de devenir diphasiques en cas de fort flux de chaleur (utilisables pour le refroidissement de batteries de véhicules électriques). L’utilisation d’un fluide diélectrique à travers des matériaux poreux est également considérée afin d’optimiser les systèmes de refroidissement pour l’électronique de puissance (J. Glass, Idex/IRS UGA).

Une seconde méthode d’intensification, que l’on peut qualifier d’active, consiste à appliquer un champ magnétique ou un champ acoustique à un écoulement afin d’intensifier les transferts.

L’influence d’une induction magnétique (intensité, uniformité) sur la rhéologie et sur la conductivité thermique d’un ferrofluide a été étudiée expérimentalement (W. Cherief). Cette démarche expérimentale a permis de mettre en évidence l’influence du champ magnétique et de son intensité sur les forces de cisaillement. De plus, l’étude de l’échange de chaleur en convection forcée sous champ magnétique, avec une condition de flux de chaleur imposé à la paroi, a permis de caractériser l’influence de plusieurs paramètres liés à la configuration spatiale du champ magnétique appliqué, et à l’effet de l’uniformité du champ sur l’intensification des échanges de chaleur. La compréhension et l’analyse de ces résultats ont été consolidées par l’étude de la conductivité thermique du ferrofluide sous champ magnétique. Á l’issue de ces caractérisations, l’application des ferrofluides pour le refroidissement de composants électroniques de puissance a été testée par une mise en œuvre expérimentale. Ces essais ouvrent la voie pour de nouvelles recherches et permettent de mener des réflexions relatives aux domaines d’application des ferrofluides [Cherief et al. 2017].

L’application d’une onde acoustique ultrasonore perpendiculairement au sens d’écoulement d’un fluide a démontré son efficacité dans l’intensification des transferts de chaleur. Les courants acoustiques générés à une fréquence de 2MHz ont une influence significative sur la perturbation hydrodynamique de l’écoulement à une échelle macroscopique, et cette influence est davantage prononcée en régime laminaire où l’écoulement est par définition stable. Le coefficient d’échange thermique à la paroi passe du simple au double entre un mode ‘silencieux’ où aucun champ n’est appliqué et un mode acoustique, tant que Re < 2000. Ce gain est réduit en régime turbulent, mais reste supérieur à l’unité [Bulliard – Sauret et al. 2017]. Pour une fréquence d’excitation de 25 kHz, de la cavitation acoustique apparaît et l’implosion des bulles de vapeur perturbe l’hydrodynamique de l’écoulement à une échelle plus fine, de l’ordre du millimètre. Cette perturbation a un impact sur la couche limite thermique lorsque les tailles caractéristiques de la couche limite et de la zone d’influence de la cavitation sont du même ordre de grandeur.

Illustration de la zone d'influence de la cavitation acoustique au sein de la couche limite d'un écoulement, générée par le transducteur ultrasonore à 25 kHz pour un nombre de Reynolds de 4500
Illustration de la zone d’influence de la cavitation acoustique au sein de la couche limite d’un écoulement, générée par le transducteur ultrasonore à 25 kHz pour un nombre de Reynolds de 4500

La présence de cavitation acoustique dans un échangeur intensifie les transferts grâce au niveau de turbulence supplémentaire causé par l’implosion des bulles de cavitation. L’objectif à terme est d’aboutir à la conception d’un nouveau type d’échangeur – réacteur intégrant une technologie ultrasonore, capable entre autres de réduire également les problèmes d’encrassement. Les résultats obtenus ont donc permis une meilleure compréhension des mécanismes d’action des ondes ultrasonores au niveau de la couche limite hydrodynamique et thermique (O. Bulliard – Sauret, Ademe). Les essais réalisés ont suivi deux approches distinctes mais parfaitement complémentaires : une approche thermique permettant d’accéder à des grandeurs caractéristiques du transfert de chaleur (coefficients locaux d’échange convectif) ; une approche hydrodynamique par PIV permettant d’établir le lien avec la turbulence observée au sein de l’écoulement (C. Poncet).

(F. Ayela, N. Caney, D. Colombet, S. Ferrouillat)